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Une sanglante nuit de noces à Khénifra

Les résidents d’un quartier modeste de M’rirt, dans la province de Khénifra, étaient presque tous les invités de Rachid et de ses parents. Ils ont eu la mauvaise surprise d’une fête gâchée par un meurtre commis sur la personne d’un d’entre eux, sans comprendre pourquoi un tel drame s’est produit cette nuit-là. Ils en garderont le souvenir d’une fuite éperdue hors de la tente caïdale, dans un mouvement de foule totalement paniquée.
Pour quelle raison ? Sous la tente caïdale qui abritait les deux mariés, leurs invités et la troupe musicale, un cadavre venait d’être découvert. D’où la réaction des gens, dont certains ont dû se dire : «Fuyons avant d’y passer nous aussi…»
Lorsque la tente a été évacuée, il n’y est resté que le corps sans âme d’Abdellah, gisant dans une mare de sang. A ses côtés, folle de douleur, ne sachant quoi faire, la jeune épouse de la victime, vingt-quatre printemps et déjà maman d’une petite fille âgée de quelques mois seulement. La femme est secouée de sanglots silencieux tandis que l’une des personnes présentes s’occupe d’appeler la protection civile.
Alertés, les éléments de la gendarmerie royale se sont dépêchés sur les lieu. Sans tarder, ils ont entamé l’interrogatoire de quelques invités.
– «Je n’ai rien vu»
– «Je ne sais rien»
– «J’ai couru en dehors de la tente lorsque j’ai constaté que tout le monde prenait la fuite…»
Ces réponses de la majorité des invités ne permettent évidemment pas aux enquêteurs de mettre à jour une piste d’investigation. Les gendarmes ne baissent pourtant pas les bras. Au contraire, ils poursuivent leurs interrogatoires des invités, un à un, jusqu’aux premières heures de l’aube.
C’est alors que soudain, Aziz, l’un des invités, fait une déclaration d’où jaillit la lumière. Dans ce climat de tension dramatique, son témoignage suscite le soulagement de tous : Aziz, âgé de 24 ans, affirme avoir vu Brahim. B courant à l’intérieur de la tente caïdale armé d’un grand couteau. Les invités qui l’ont remarqué en même temps que lui ont pris la fuite et lui seul est donc là pour en témoigner.
Aziz remarque également le corps d’Abdellah gisant dans une mare de sang et il fait tout de suite le lien, évidemment : pour lui, c’est clair, Brahim B. est l’assassin. Aussitôt, les enquêteurs se lancent à la recherche du suspect, qu’ils interpellent chez lui, plongé dans un profond sommeil.
«C’est toi qui as tué Abdellah ?» La question fait sursauter Brahim, qui bondit dans son lit. Les yeux écarquillés, il se fige dans le silence comme si cela pouvait suffire à se défendre de l’accusation qui le surprend ainsi.
«Viens avec nous», lui intime le chef de la brigade.
Brahim, toujours silencieux, enfile ses vêtements et les accompagne sans opposer de résistance ni poser la moindre question. Est-il vraiment le meurtrier d’Abdellah ?
«Non», se décide-t-il enfin à répondre, comme s’il se réveillait d’un profond sommeil. S’enhardissant, Brahim ajoute : «Je ne sais pas pourquoi ce Aziz dont vous me parlez m’accuse comme il le fait.» Il entreprend donc de raconter sa version des faits.
«C’est seulement vers 1 h du matin que je suis arrivé sur les lieux de la soirée de noces…», précise-t-il.
Quand il y est arrivé, il a remarqué Khaled, son frère Saïd et Abderrahim leur cousin, occupés à s’enivrer d’eau-de-vie dans un coin discret. Il leur a adressé ses salutations avant de pénétrer sous la tente caïdale. C’est alors qu’il a été rejoint par Abderrahim qui s’enivrait et par un certain Moussa. Tous les trois ont commencé à danser.
Soudain, Abderrahim a poussé un grand cri. Il venait d’être frappé à la tête d’un coup de bendir. C’est Abdellah qui l’a frappé. Pourquoi? Nul ne le saura jamais. C’est à ce moment que tout a basculé. Les deux frères Khaled et Saïd, l’un armé d’une faucille et l’autre d’un couteau, se sont précipités pour prêter main forte à leur cousin. Mais qui a mortellement frappé Abdellah ? «J’ai entendu Khaled, qui était sous l’effet de l’eau-de-vie, crier s’être vengé pour son cousin», a affirmé Brahim qui nie avoir participé au meurtre ni avoir été en possession d’une arme blanche. Mais pourquoi donc Aziz l’a-t-il accusé ? Aziz a répondu avoir cru que c’est Brahim qui était en possession du couteau. Une réponse qui a innocenté catégoriquement Brahim, mais qui a impliqué les deux frères et leur cousin dans cette affaire de meurtre sans mobile apparent. Quant aux mariés, ils n’oublieront certainement jamais cette nuit de noces sanglante qui risque peut-être, pour corser l’addition, de ne pas leur porter bonheur…

Abderrafii ALOUMLIKI
Aujourdhui.ma

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