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Fraude aux «mouchoirs d’or»

Dans les grandes villes, particulièrement sur les ronds-points de Casablanca, beaucoup de jeunes et de moins jeunes proposent aux conducteurs et aux usagers de la route des boîtes de mouchoirs en papier, à un prix moins cher que celui des épiceries. Les boîtes en provenance de Syrie ou de Jordanie ne sont pas concernées. Ainsi, on a tendance à croire qu’en achetant une boîte, comme les autres, on profite de l’offre sur-place et l’on encourage des démunis à vivre dignement grâce à un commerce informel qui les sauve, certes, de la misère atroce où vivent parents et enfants. Si quelque chose en eux les empêchent de voler et de tuer pour vivre, ils contrebandent pour survivre sans savoir qu’ils constituent une couche de paille.
La vérité est autre. L’enfant ou la femme détaillant ne perçoivent que des miettes du gros lot. C’est plutôt le producteur et ensuite l’intermédiaire qui se sucrent grâce à la fraude dans les régimes économiques.
La ouate comme toute matière première est soumise, en gros, à deux régimes économiques : l’admission temporaire ou la consommation locale.
Dans le cas de la dernière, une déclaration à la douane suffit pour évaluer droits et taxes à payer.
Dans le cas de la première, la déclaration de l’admission temporaire est réglementée par un certain nombre de clauses.
D’abord, il faudrait que la transformation de la matière première importée ne dépasse pas deux ans et que le poids du produit fini corresponde approxim-ativement au poids réel de la marchandise importée. La différence du poids entre les deux quantités d’avant et d’après les transformations, il y en a toujours une, doit être justifiée devant l’inspecteur des douanes, le plus souvent sous forme de chutes.
Or, ce n’est toujours pas le cas. La douane avait démantelé à Casablanca, il y a quelques années, un trafic de la ouate. Il s’agissait d’une grande unité industrielle de la place qui importait en admission temporaire de la ouate pour la transformer en mouchoirs en papier destinés à être commercialisés dans un pays africain.

Abus du régime… comique
La prise avait montré à l’époque que le poids des quatre conteneurs contenant les boîtes (produit fini) était largement inférieur à celui de la matière première importée. L’affaire s’était soldée par un arrangement débouchant sur une amende et… que vogue la galère.
Or, ce genre de pratiques, admis conforme (sic !) combien rentable pour ses auteurs, dépasse la fraude dans les régimes dits comiques de la douane. Parce qu’en fin de compte, ces pratiques font rire. Il s’agit d’escroquerie, de fausses écritures comptables, de fausses déclarations, d’actes régis en somme par le code pénal.
Concernant ce seul marché de la ouate, la fraude s’effectue sur plusieurs étapes. Profitant des facilités accordées par la douane aux investisseurs, certains importateurs établissent des déclarations non-conformes au poids, à la qualité et au prix d’achat de la marchandise.
La fausse déclaration sur le poids, revue à la baisse, permet une marge de manœuvre à l’exportation du produit fini. La différence est écoulée sur place au marché noir.
Les dépôts de Derb Omar sont pleins à craquer si la marchandise ne trouve pas preneur le soir même vers d’autres destinations (Sebt Gzoula, Talat Lâounate, Tata ou Oualidia…) où le contrôle est plus absent qu’ailleurs.
La fausse déclaration sur la qualité, toujours en admission temporaire, permet d’écouler la marchandise de qualité supérieure sur le marché local à un prix fort et de substituer une marchandise de qualité moindre à l’export, surtout si l’on est propriétaire et de l’unité de fabrication et de l’unité de réception et de commercialisation du produit fini.
Enfin, la fausse déclaration sur le prix d’achat, revue à la hausse, puisqu’il ne s’agit que d’une admission temporaire qui échappe aux droits et taxes de la douane, permet de faire fuir et de mettre de côté de l’argent en devises à l’étranger en driblant le respectable Office des changes.
Ceci, en plus de la vente au noir du produit fini, sur le marché local. Une vente qui échappe à tout contrôle (Quel est ce consommateur qui s’assure que la boîte pèse tant de grammes ou contient tant de mouchoirs en papier comme consignés ?). Ni T.V.A ni droits de douane ni taxes sur le chiffre d’affaires.
Une vraie poule aux œufs d’or qui pond des milliards de centimes dont la douane et le consommateur ne voient que des mouchoirs…jetables, certes, mais au prix d’or presque !

Mohamed Ahed
07 Novembre 2005

source : Lagazettedumaroc

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