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Opinions & débat – Université : l’échec de la réforme

En vérité, on a affaire à une imposture : le LMD n’a rien changé, ni sur le plan des disciplines ni sur le mode de gestion (voir le Séminaire organisé par le SNESup en 2005) ; enfin, ni sur les effectifs en ressources humaines et financières pour mener à bien et dans de bonnes conditions une réforme : le changement dans la stabilité.

En effet, loin de susciter une réflexion sur les savoirs et leur réorganisation, sur la place de l’université dans le tissu local, ses liens avec les collectivités environnantes et les entreprises publiques comme privées, le rôle de l’université dans ses rapports avec les grandes écoles, la place de la recherche, la question de la professionnalisation et des débouchés… La réforme conduite dans l’urgence et la précipitation n’a fait que reproduire, dans la majorité des cas, l’existant.

La reconduction des disciplines et de leur découpage traditionnel, mais aussi des départements sans souci de transversalité, au lieu d’inaugurer de nouveaux dispositifs de coopération, d’écoute et de reconnaissance mutuelle des savoirs.
L’université, dans cette configuration, n’est plus un espace du savoir et de transmission, elle est une machine bureaucratique fonctionnant à vide. La réforme est absente dans les écoles de formation des cadres et l’absence de connexions entre celles-ci et l’université est notoire ; les relations entre les deux composantes de l’enseignement supérieur qui n’ont pas de raisons fondamentales de s’opposer est un échec du LMD à la façon marocaine.

Les enseignants chercheurs sont transformés en simple courroie de transmission de l’administration (désengagement de l’administration dans l’organisation des examens…). Dans un tel contexte, la réforme et les nouveaux processus d’accréditation et de validation des diplômes ne seront qu’ un simulacre dont les bénéficiaires ne seront pas les étudiants… Le LMD, par la multiplication des examens et des sessions de rattrapage ne fait que renforcer la possibilité pour le plus grand nombre d’étudiants d’aller jusqu’à la licence (pré requis non exigés) (au lieu du DEUG) mais sans s’interroger sur la valeur d’un parchemin qui, loin de garantir un métier… Les enseignants chercheurs tentent sans succès d’endiguer le torrent qui les emporte et sur lequel n’ont aucune prise. Le LMD dans ces conditions, n’est qu’une monnaie de singe, un trompe-l’œil.

Enfin, le LMD créera dans un futur proche des clivages très forts entre deux philosophies de l’enseignement : une philosophie utilitariste à court terme qui veut que la formation soit essentiellement dirigée vers des débouchés professionnels; l’autre philosophie, qui était la grande ambition du XVIII ème siècle, qui fait de l’université le lieu d’une formation générale, adaptable et un observateur critique de la Société… Cette opposition doit constituer un des débats autour du système LMD.

La Conférence de la Sorbonne (1998), puis celle de Bologne (1999) et de Prague (2001), ont déterminé les principales lignes directrices pour construire une architecture identique dans toute l’Europe afin de faciliter le développement de la mobilité des étudiants.
On revient d’une certaine façon au premier principe de l’Université naissante du Moyen-âge selon lequel l’étudiant allait chercher les enseignements souhaités là où ils existent.

Mais on va également plus loin en participant à la construction d’un espace européen de formation supérieure et en recomposant «l’offre » de formation des établissements universitaires. En effet, le système (LMD) repose sur une organisation des enseignements en semestres et en modules capitalisables sanctionnés par des crédits, facilitant ainsi les transferts intra- établissements et inter- établissements aux plans national et transnational. Par ailleurs, la notion de parcours liée au projet professionnel, tout en confortant les formations professionnalisées liées à des métiers clairement identifiés, transcende d’une certaine façon les clivages disciplinaires, donnant ainsi plus de souplesse à la formation des étudiants en s’adaptant aux évolutions des pratiques professionnelles et à l’émergence de nouveaux métiers. L’Université acquiert ainsi une capacité et une rapidité de réponse aux demandes sociétales, tout en maintenant ses missions traditionnelles de production de connaissances et de formation des enseignants chercheurs.

Ce niveau système introduit la césure des cycles, non plus entre la deuxième année de formation (DEUG) et la troisième année, mais entre la troisième année et la quatrième année (1ère année du Master). L’une des particularités du dispositif français est qu’il permet de faire de coexister, pour une période transitoire, l’ancien et le nouveau système universitaire, et, par conséquent, de délivrer les diplômes intermédiaires de DEUG et de maîtrise. En effet, les textes antérieurs ne sont pas abrogés ; ce qui laisse aux établissements universitaires toute latitude pour adopter ou non le nouveau dispositif. Toutefois, une adoption du système par l’ensemble de l’université, au fil du renouvellement des plans quadriennaux est envisagée à l’horizon 2010.

Le nouveau système reprend de l’ancien un certain nombre d’éléments : l’organisation des études en diplômes et en grades, l’organisation des enseignements par semestres et en unités d’enseignements dont chacune d’entre elles correspond à un volume de crédits à concurrence de trente crédits par semestre, la capitalisation et la compensation des unités d’enseignement.
Le système (LMD) est bâti sur quatre notions articulées les unes avec les autres, vont recomposer la formation universitaire : ce sont successivement le domaine de formation, le projet professionnel, le parcours de formation et l’équipe pédagogique.

Larbi Abibi
Enseignant universitaire à Béni Mellal

source:lematin

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