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Les Marocains connaissent mal leur histoire

Les raisons de cette ignorance restent floues, même si l’enseignement national n’est certes pas sans faille. Car il suffit de feuilleter les manuels scolaires pour constater que, par exemple, aucune allusion n’est faite aux années de plomb ou à certains principes historiques, telle que l’amitié judéo-musulmane, qui permettraient de mieux comprendre la société marocaine actuelle. Pour montrer la gravité du phénomène à nos lecteurs, l’équipe du Matin est partie à la collecte des aveux.

Le traité de Fès, le protectorat, le Maroc de Lyautey, le régime de Vichy, mais aussi le mouvement nationaliste, l’indépendance ou alors la rétrocession du Sahara au Maroc au lendemain de la Marche Verte. Ces événements sont incontestablement les traits majeurs de l’histoire marocaine contemporaine, enseignée par le système éducatif national.

Nul besoin de rappeler que nous méconnaissons l’histoire de notre Royaume, quelle soit antique ou contemporaine ; ses faits sont loin d’être connus de tous. Cependant, des évènements centenaires, datant de l’Émirat de Nékor ou du Maroc pastoraliste, sombrent dans l’oubli, n’ayant fait leur passage sur les pages de l’histoire que furtivement.

Mohamed Chamseddine, ancien professeur d’histoire, affirme : « La nouvelle génération semble faire fi de sa richesse et méconnaît l’histoire de son pays; le niveau scolaire, lui, chute librement. Paradoxalement, beaucoup d’élèves se passionnent tout particulièrement pour l’histoire de l’Europe par exemple…» Selon lui, «ne pas connaître l’histoire de son pays est un véritable handicap».

Qu’ils soient étudiants, fonctionnaires ou de simples citoyens, nos compatriotes avouent méjuger le passé de leur patrie. Certains peineraient même à associer les villes impériales aux noms de leurs sultans, d’autres connaîtraient moins l’ordre des sept grandes dynasties marocaines. D’autres encore auraient commencé à connaître l’histoire du Royaume une fois leur baccalauréat en poche ! Quoi qu’il en soit, la situation ne fait pas toujours rougir…

Kenza est entichée de lecture, mais avoue timidement méconnaître l’histoire de son pays. «J’avoue que je ne connais pas suffisamment l’histoire du Maroc et quand je vais à l’étranger, je n’ose pas aborder ce sujet. Car je ressens la honte lorsque je vois qu’un étranger connaît mon pays mieux que moi !», nous confie-t-elle.

Quant à Zineb, elle nous révèle qu’elle a appris à connaître son pays de loin, nostalgie et amour de la patrie obligent… «Ce n’est que lorsque j’ai quitté le Maroc pour mes études supérieures que j’ai commencé à m’intéresser au passé du Royaume, ses dynasties, sa préhistoire ainsi que son histoire contemporaine», nous dévoile-t-elle, avant d’enchaîner avec le même étonnement : «Quand j’étais en Espagne, j’ai vu que mes amis, venus d’horizons lointains, savaient déjà tout sur leur pays, alors je me suis mise à faire des recherches sur le mien.»

Les raisons de cette désaffection endémique restent mystérieuses même si l’enseignement national n’est certainement pas sans failles. Il suffit de feuilleter quelques manuels scolaires d’histoire du Maroc pour constater qu’aucune allusion n’a été faite à des événements comme la longue période des années de plomb, ainsi qu’à des principes historiques telle l’amitié judéo-musulmane. Toutefois, se passionner pour l’histoire de son pays reste aussi une question de goût.

«Ce n’est pas un hasard si beaucoup de jeunes ne connaissent pas bien leur pays, nos clients achètent rarement des livres sur leur pays, ce sont les touristes européens qui s’y intéressent», nous apprend Abdou, un jeune libraire.
Toutefois le désamour de l’histoire marocaine ne signifie nullement que les Chérifiens ne lisent pas ! «Il a fallu que je quitte le lycée pour que je commence à lire sérieusement. Pourrait-on vraiment tout apprendre à l’école ?

Personnellement, l’histoire du Maroc n’a jamais été mon fort, et puis cela ne m’a jamais vraiment attiré, à quoi cela pourrait-il nous servir ?», s’interroge Jamal, un jeune fonctionnaire public. «Par contre, je suis assidûment l’actualité et l’économie nationales, ce qui semble être indispensable pour chaque citoyen marocain…», poursuit-il.

Si la mémoire du pays reste, jusqu’à nos jours, inexplorée par les siens, elle ne semble pas avoir laissé indifférents des historiens venus de toutes parts pour explorer le vrai Maroc. Les indigènes, eux, vivent avec insouciance leur anorexie de lecture.

Houda Belabd
LE MATIN

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