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Les enjeux d’une libéralisation

L’ANRT est à pied d’œuvre pour boucler l’évaluation technique des offres déposées par les trois candidats aux licences nouvelle génération. Les soumissionnaires ont déposé quatre offres englobant les différents lots proposés : la boucle locale dont deux offres portant sur la mobilité restreinte, le réseau national et le réseau international. À l’issue de l’évaluation technique, le Premier ministre, Driss Jettou, devrait annoncer les deux adjudicataires dans les prochains jours. Début juillet, annonce-t-on de source autorisée. En attendant, les spéculations vont bon train sur l’issue de cet appel d’offres bien que l’enjeu local des licences favorise de facto les opérateurs déjà présents sur place. La libéralisation du fixe est le dernier chaînon manquant pour introduire une concurrence totale sur tous les segments des télécoms au Maroc. L’objectif est d’avoir trois opérateurs par segment. Pour le régulateur, la présence de trois candidats est un succès en soi après l’échec de l’appel d’offres de 2002. Ceci est le résultat d’un processus de préparation de longue haleine marqué par une approche marketing menée par l’Agence nationale de la réglementation des télécoms pour séduire les opérateurs et répondre à leurs attentes réglementaires et économiques.

Enjeu local
À cet effet, le régulateur a procédé à la préparation d’un ensemble de pré-requis comme la mise à jour de la loi sur les télécoms et le renforcement du rôle d’arbitrage et de sanction de l’ANRT, la publication du plan national de fréquences, l’actualisation du catalogue d’interconnexion fixe d’IAM et une visibilité réglementaire sur la suite du processus. L’ANRT a également entamé une campagne de placement des licences ayant abouti au retrait de 33 dossiers. Si au final, il n’y a que trois soumissionnaires, ce n’est pas pour autant un échec. La configuration locale de l’appel d’offres et le contexte international des télécoms expliquent ce constat. En effet, il est très difficile à un opérateur non présent sur le territoire marocain de partir à zéro en étant challenger sur tous les segments . Le coût des investissements à consentir est exorbitant par rapport au retour sur investissement escompté. C’est la raison pour laquelle les grands opérateurs internationaux, trop absorbés par les problématiques de leurs marchés domestiques, n’ont pas répondu présents. Pour les opérateurs locaux ayant soumissionné, à savoir Maroc Connect et Méditel, leur candidature serait cohérente dans le cadre d’un renforcement de leurs positions sur le marché marocain des télécoms, estiment plusieurs spécialistes.
Les opportunités qu’offrent la libéralisation du fixe sont nombreuses. Au-delà des particuliers, c’est le segment des entreprises qui constitue aujourd’hui la cible prioritaire de l’opérateur historique comme des futurs candidats. L’étude menée par Upline Securities pour le compte de l’ANRT chiffre le marché à 6 milliards de dirhams et relève que les entreprises se plaignent ouvertement de la cherté des coûts des communications fixe et l’absence d’offres complètes. L’intérêt grandissant pour la voix sur IP montre l’étendue de l’attente des patrons d’entreprises pour baisser enfin le principal poste de charge qui grève leur rentabilité. Dans le détail, les nouvelles licences vont consacrer la convergence Voix/Data, Télécoms/Audiovisuel et fixe/mobile. D’ici 5 à 10 ans, l’ANRT veut atteindre le chiffre de 4 millions d’abonnés fixe, soit 51% des ménages et 17 millions d’abonnés mobiles.

Scandale politico-financier
Alors que l’appel d’offres pour les nouvelles licences de l’ANRT n’a intéressé aucun opérateur international et semble se résumer à un enjeu local entre Méditel et Maroc Connect, la présence du groupe Orascom dans la compétition suscite bien des interrogations. Ce groupe égyptien mené par un homme d’affaires bien introduit, en l’occurrence Naguib Sawiris, traîne, selon des sources dignes de foi, une réputation sulfureuse dans plusieurs pays arabes. En Egypte déjà, sa proximité avec le régime de Moubarak et le parti au pouvoir est de notoriété publique. En Algérie où Orascom est l’opérateur mobile depuis 2001, le groupe a été l’objet d’un scandale politico-financier de premier ordre. En effet, le Matin d’Alger, dont le directeur de publication croupit en prison sur ordre de Bouteflika, a publié en 2003 des révélations fracassantes sur les liens entre Sawiris et Saïd Bouteflika, frère du Président algérien et officiellement Conseiller à la Présidence de la République . Isabelle Verdier, journaliste à Indigo Publications et auteur d’un ouvrage intitulé “Algérie, les hommes du pouvoir confirme ces liens. Cette proximité avec le clan du président algérien a permis à Orascom d’avoir la licence d’opérateur mobile en Algérie face à des mastodontes comme Telefonica et France Telecom. En effet, la présence d’Orascom de façon dominante en Algérie, la politique d’investissements spéculative du groupe (il s’est retiré de plusieurs pays d’Afrique noire) et sa stratégie d’entrisme dans les cercles du pouvoir politique posent des questions-clés aux pouvoirs publics marocains. Peut-on prendre le risque de confier un secteur stratégique à un opérateur aux accointances étranges et inquiétantes ? Quid de la souveraineté sur les secteurs sensibles de l’économie ? Le marché des télécoms a-t-il besoin d’un investisseur ayant bâti sa richesse en Algérie grâce au soutien du régime en place ? Pour quelle valeur ajoutée ? Pour rappel, Maroc Telecom a bien soumissionné à l’appel d’offres de la licence mobile en Algérie, sans succès évidemment. Ce qui montre bien qu’en matière de souveraineté télécoms, le voisin de l’Est ne badine pas.
source:lagazettedumaroc

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