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La vie chere exploitée par les gauchistes

Les fins de mois connaissent plus de frénésie. Normal, puisque c’est à ce moment-là que des mères de familles doivent passer aux caisses de la Redal, de la Lydec ou d’Amendis pour s’acquitter des factures d’eau ou d’électricité. A Mohammédia, des femmes et des enfants, issus des quartiers défavorisés de la prétendue ville des fleurs, avaient poussé l’ardeur jusqu’à tenir des sit-in quotidiens pour crier leur malaise et dire qu’ils en ont marre du terrible dilemme : subvenir aux besoins de familles nombreuses ou vivre, quand c’est encore possible, de kilowatts et d’eau potable. À Khénifra, ville dirigée par le PJD Lahcen Chakira, les femmes du quartier Assaka avaient décidé de commun accord de manifester devant le siège de la province. Le 27 octobre 2006, les familles des quartiers Al Massira et Elkors rallient le mouvement. 3.000 personnes se sont ainsi retrouvées au centre-ville de Khénifra. Sauf que cette fois, elles étaient encadrées par une structure : la coordination locale contre la vie chère. L’AMDH (Association marocaine des droits humains), Annahj Addimocrati et le PADS (Parti de l’Avant-garde démocratique et socialiste) canalisent la colère et mobilisent la population. Depuis, Khénifra vit au rythme des vociférations de femmes et d’enfants. Le même scénario se répète un peu partout. L’idée de la Tansikia est partie de Rabat avec l’organisation, le 11 septembre dernier, d’une manifestation contre la hausse des tarifs du transport en commun. C’était une initiative de l’AMDH. Aujourd’hui, la coordination de Rabat englobe 22 composantes, des ONG pour la plupart, et quelques partis politiques non représentés au Parlement pour la majorité.
À Bouarfa, une poudrière par excellence du Maroc inutile, la coordination locale essaie de contenir une situation qui risque de dégénérer à tout moment. Aux dernières nouvelles, les populations refusent toujours de payer les frais d’électricité. Ce vendredi, un sit-in était encore prévu devant les locaux de l’ONEP (Office national de l’eau potable).
Là où ce genre d’organisme n’est pas présent, les populations protestent devant les symboles de l’administration : le pachalik, sinon le siège du caïdat. Les slogans sont toujours les mêmes ou presque : chacun crie son désarroi dans sa propre langue et avec la logistique dont il dispose. «Aucun financement spécifique n’est prévu, mais chaque composante apporte sa contribution», note Aziz Akkaoui du secrétariat de la coordination de Khénifra qui affirme que des membres de la coordination n’hésitent pas à mettre la main à la poche pour l’acquisition du matériau nécessaire à la confection d’une banderole. Dans plusieurs localités, les femmes et les enfants brandissent les portraits de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et agitent le drapeau national quand il n’est pas possible de s’en draper. Et parfois, en forçant sur les cordes vocales, une facture exorbitante d’eau ou d’électricité, telle la preuve de l’affront fait à la veuve et à l’orphelin.
«Les femmes sont les plus pénalisées par ces hausses vu que ce sont généralement elles qui doivent jongler avec les finances du ménage», explique une militante associative pour qui les hausses successives sont ressenties comme une intolérable hogra. L’indignation est encore plus grande quand c’est un concessionnaire étranger qui est fustigé par les manifestants et là les slogans sont sans appel. «Lydec siri bhalek, Mohammédia machi dialek !» (Lydec va-t-en, Mohammédia ne t’appartient pas !) est celui qui revenait plus dans la cité. Ailleurs, on change les noms des villes et des concessionnaires et on s’égosille pendant quelques heures à dire sa colère.
«Allez demander à quelqu’un qui a un salaire de 600 DH de régler une facture de 1.200 DH entre eau et électricité !», s’indigne Aziz Akkaoui qui affirme que les coordinations sont une sorte de soupape de sécurité. Un gage contre tout débordement.
Pour le moment, note-t-on au niveau central de l’AMDH, aucun incident notable n’a été enregistré à l’exception de quelques rares cas. A Rabat, un policier, armé d’un couteau, s’était acharné sur une banderole lors d’un sit-in devant le siège de la Redal à Hay Annahda. Les choses ont failli dégénérer. «Les gens sont sages et parfois nous avons même fait du porte-à-porte pour sensibiliser les populations», déclare Aziz Akkaoui qui plaide pour un changement de mentalité envers les petites gens.
Avec la multiplication des coordinations, il fallait mettre de l’ordre dans tout le mouvement. C’est, entre autres, ce qui a été fait, le 29 octobre 2006, au niveau central, avec la mise en place d’un comité national de suivi composé de douze membres.
De la récupération politique en attendant 2007, surtout que l’on retrouve, en fer de lance, une présence en force de l’extrême gauche ? Adib Abdeslam, membre dirigeant de l’AMDH et membre du comité national de suivi, s’en défend. «Face à la démission des partis représentés au Parlement et des syndicats, il était urgent que l’on mobilise pour dire halte aux hausses successives», affirme M. Adib. «Les grands partis n’ont émis le moindre communiqué de protestation, occupés qu’ils étaient à se partager le gâteau du 8 septembre 2006, la mascarade que vous savez !», s’indigne-t-il. Pour les responsables de l’AMDH, et selon les conventions internationales, le dossier, à dominante sociale, a aussi un caractère droit-de-l’hommiste vu que, expliquent-ils, les gouvernements sont tenus de réunir un minimum de dignité pour le vécu quotidien des populations comme le stipulent conventions et traités internationaux.
Les grands partis out ? Pas tout à fait. À Khénifra, les militants USFP sont de la bataille. Comme ceux de l’Istiqlal qui le sont dans des régions du Rif telle Al Hoceima. «Des révoltés, ironise un militant USFP, contre leurs propres hiérarchies cantonnées à Rabat».
À Casablanca, par exemple, le PJD avait officiellement menacé la Lydec de tous les enfers. Il était question de réunir des milliers de signatures pour demander la répudiation du concessionnaire. La mayonnaise n’a pas pris, mais le PJD, ses presses et députés, maintiennent la flamme à leur manière.
D’un autre côté, on retrouve des bouts de Tansikiate (débarrassées du Peuple) qui passent à autre chose : fustiger, parfois à quelques dizaines de mètres, les projets de lois électorales qualifiés de liberticides pour les petits partis. Dans les deux cas, c’est le gouvernement qui en prend pour son grade, mais le style est plus relevé, l’affluence moins importante.
Les Tansikiate, malgré tous les airs de charivari, commencent à mieux s’organiser. Il s’en est même trouvé des coordinations qui ont réussi des sit-in avec 4.000 protestataires, sinon un peu plus. Si l’on multiplie par plus de soixante, on a la carte du Maroc en colère contre la vie chère. Moins l’écrasante majorité des villes du Sahara, ajoutent les langues malintentionnées.
Les coordinations s’offrent même le luxe, faute d’autre chose, d’organiser, le 14 décembre 2006, une journée nationale de protestation avec des sit-in qui se tiendront simultanément à 17 heures. Dix jours plus tard, le 24 décembre, c’est Rabat qui abritera une marche nationale. La fin des Tansikiate ? «Nous allons en faire un mouvement social contre, en général, la détérioration des services publics, mais aussi pour appeler à la révision des politiques sociales et de la privatisation», réplique Adib Abdeslam. En attendant, le comité national de suivi organise une conférence ce vendredi, avec la participation de plusieurs personnalités dont le camarade Abdellah El Hourrif et tient une sorte de procès de la vie chère.

Quand Al Adl s’incruste

Al Adl Wal Ihssane est présente dans les diverses manifestations contre la vie chère même si ses militants s’abstiennent de recourir aux slogans propres à la Jamaâ. Pour un membre du comité national de suivi, la secte de Abdeslam Yassine ne fait pas partie des secrétariats des coordinations locales, mais rien ne peut l’empêcher de prendre part aux manifestations. Les adlistes font, à leur manière, de la récupération politique pour leur mouvement, un opportunisme de longue date. Là où ils se sentent majoritaires, ils n’ésitent pas à imposer leurs méthodes. C’était le cas, le 13 novembre 2006, à Chefchaouen. Les manifestations contre la vie chère sont une nouvelle occasion pour Al Adl de dire qu’elle est toujours là. Un autre relais après les journées portes ouvertes, les sit-in de solidarité avec l’Irak, la Palestine et le Liban. Dernière trouvaille de Al Adl Wal Ihssane, l’organisation des Waqafat Masjidiyah (sit-in dans les mosquées).

Une aubaine nommée Internet

Fidèle aux méthodes des altermondialistes, les Tansikiate recourent massivement à Internet pour se faire connaître et faire connaître leur combat à une plus large échelle. Outre les blogs, dont celui de Khémisset par exemple (www.amdhkhemisset.canalblog.com), les coordinations ont mis en place plusieurs groupes sur Yahoo notamment pour le partage des communiqués et surtout des photos. Sur d’autres listes de diffusion, on retrouve aussi des contributions fustigeant, entre autres, la gestion déléguée avec force exemples (Argentine notamment, Bordeaux…). Internet sert aussi de moyen de coordination pour les Tansikiate. Au lieu des désuets fax, on recourt plutôt au courrier électronique pour diffuser les projets de communiqués et les appels à la mobilisation. Idem pour inonder les rédactions. Mais surtout pour garder des traces d’un mouvement qui commence à s’éterniser. La démocratisation des prix des appareils numériques et la mode des cybercafés ont largement contribué à faciliter la tâche aux protestataires.

Mohamed Boudarham
Aujourdhui.ma

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