Le Royaume s’attaque à la cybercriminalité.

Ainsi, le danger de la cybercriminalité ne concerne pas que les pays industrialisés. Même les pays en voie de développement sont désormais exposés aux virus qui s’attaquent particulièrement aux téléphones mobiles. Et si ces virus ne peuvent détruire les infrastructures, ils peuvent servir de vecteur à d’autres crimes comme l’usurpation d’identité.

Et si la cybercriminalité pose des défis jusqu’ici inconnus du système judiciaire, il n’en demeure pas moins que sa nature globale suppose des problèmes légaux difficiles à résoudre.

Pour la simple raison que les criminels peuvent agir en utilisant des serveurs en dehors du territoire où ils commettent leurs méfaits et ce, sans courir le risque d’être arrêtés et soumis aux sanctions des règlements nationaux. Sur certains plans, l’on peut considérer que la criminalité informatique est méconnue, peu ou pas définie, tandis que son étendue et ses causes ne sont pas clairement établies.

Les raisons sont multiples, parmi lesquelles la plus présente est certainement la frilosité vis-à-vis des nouvelles technologies. Les personnes concernées n’ont pas de réelle connaissance de la criminalité informatique, soit qu’elles considèrent que celle-ci est trop compliquée et hésitent à donner des définitions, des solutions à un problème qui change de forme très rapidement, soit au contraire parce qu’elles la sous-estiment, phénomène classique dans les politiques de sécurité des entreprises. L’on reconnaît toutefois que si l’outil informatique est un facteur de productivité, il n’en demeure pas moins qu’il demeure aussi un moyen de fraude.

Mohamed Ouzgane, docteur d’Etat en droit et spécialiste en droit des Nouvelles technologies, souligne dans une de ses études, parue dans le Remald, que dans l’affaire dite «des manipulations téléphoniques», la justice marocaine a été confrontée à la délicate question de recherche de qualification de l’usage délictueux de l’informatique et des télécommunications.

Dans le cas d’espèce, indique-t-il, il était question de fonctionnaires de l’ex-ONPT qui, moyennant rétributions, permettaient à certains abonnés du téléphone de communiquer avec l’étranger sans que leurs appels soient comptabilisés. Le stratagème consistait en l’envoi d’un message en ce sens à l’ordinateur du central téléphonique qui s’exécutait en conséquence.

Les juges de première instance ont condamné les prévenus sur la base de l’article 521 du code pénal (appropriation frauduleuse de l’énergie électrique ou toute autre énergie ayant une valeur économique) avant qu’ils ne soient relaxés au niveau de la Cour d’Appel.

Ce simple exemple a démontré les limites textuelles.

En effet et si par le biais des incriminations classiques de vol, d’escroquerie ou d’abus de confiance, le droit pénal classique permettait de sanctionner les comportements portant atteinte à l’ordinateur lui-même, il ne permettait pas en revanche d’appréhender les comportements délictueux pouvant porter atteinte aux biens immatériels que sont les données ou les logiciels, les intrusions dans les systèmes, les manipulations illicites de données …

D’où le projet de loi n°∆ 07-03 complétant le code pénal. Ainsi, en optant pour un texte propre en le domaine de l’informatique, le Royaume est décidé à lutter contre cette criminalité informatique. Certes, le travail du législateur n’est pas terminé mais il serait peut-être possible d’élaborer des lois ponctuelles chaque fois qu’une nouvelle difficulté surviendrait ; de repenser chaque secteur du droit en fonction de l’évolution de la société pour une cohérence plus forte entre le droit et la technique.

D’emblée, quels que soient les qualités et défauts de ce projet de loi, il faut souligner que ce type d’initiative démontre une nécessaire prise en compte exponentielle de la criminalité informatique chaque année. C’est d’ailleurs, cette peur qui explique probablement certains débordements observés dans ce projet de loi.

Cette peur se marque aussi dans l’absence de définition de concepts essentiels, avec en premier, la notion de criminalité informatique, ou encore de systèmes ou de données informatiques.

La volonté de l’Etat, au travers de ce projet de loi, est clairement d’avoir la mainmise sur le réseau Internet, principal vecteur de la criminalité informatique. Hélas, cette volonté ne s’en tient qu’au discours, les moyens financiers et humains ne suivent pas le discours.

Lematin

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