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Le public déserte-t-il les salles de cinéma ?

Dans les années 1980, les cinémas Dawliz fondés par le réalisateur Souheil Ben Barka ont éclipsé toutes les autres salles en attirant un public jeune, friand des blackboosters américains. Plus tard, avec l’ouverture du complexe cinématographique Mégarama, les Dawliz de la Corniche n’ont pu résister au mastodonte érigé sur la côte, avec ses 14 salles, son modernisme et sa programmation basée sur les grands succès américains et européens.

Même si durant le mois de Ramadan – qui jadis remplissait les salles casablancaises – la fréquentation est très faible, le Mégarama tire son épingle du jeu. Actuellement, «Indigènes» donne satisfaction aux responsables du complexe : « En une semaine, 3.005 entrées ont été enregistrées, nous sommes bien sûr loin des 800.000 entrées en une semaine réalisées à Paris, mais nous sommes quand même satisfaits vu qu’en ce mois la fréquentation des salles baisse par rapport au reste de l’année», nous confie un responsable.
Les autres films, pourtant connus et récents («Le Parfum», «Love Song»…), ne semblent pas attirer le public.

Que dire des autres salles qui survivent tant bien que mal en attendant une disparition quasi certaine ?
Sur le boulevard de Bordeaux, l’ex-célèbre cinéma Verdun est triste à voir, lui qui eut un passé si brillant et qui ne désemplissait jamais. Idem pour les fameuses salles de l’ABC et de l’Empire qui de guerre lasse ont fini par jeter l’éponge. Le Rialto, même avec «Indigènes» qu’il programme en ce moment, reste en deçà quant au nombre de spectateurs avec à peine 236 entrées en sept jours. « Le cinéma ne marche plus. On arrive à se maintenir grâce à l’organisation de concerts, de pièces de théâtre….», explique le responsable de la salle.

Le bon vieux Lynx n’est plus que l’ombre de celui des années 1960 et 1970, tant au niveau de la fréquentation qu’à celui de la qualité de la programmation. Enfin, le Ritz n’est pas mieux loti : son propriétaire, M. Belcadi, se plaint en confiant : «Cela fait dix ans que je me bats pour sauver cette salle mais en vain». Cela est-il dû à une mauvaise programmation ? «Pas du tout. Nous avons une programmation riche et variée avec des films de toutes nationalités, aussi bien arabes, américains, indiens, européens que marocains.

La vraie cause de ce marasme est d’abord l’apparition des paraboles et surtout celle du DVD. C’est vraiment le virus qui ronge ce secteur. Vous savez, il y a actuellement 110 salles à travers le Royaume dont il ne restera que 60 à la fin de l’année», réplique ce propriétaire de quatre autres salles, qui a par ailleurs complètement rénové le Ritz en le conformant aux normes du système Euromed. Cependant cela n’a servi à rien, puisque la salle est toujours désertée par le public.

Le temps des salles est bel et bien terminé pour M. Belcadi, d’autant plus que, selon lui, l’Etat se désintéresse complètement de ce secteur sinistré. Pour se faire une idée du désastre, rappelons quelques chiffres : en 2005 le cinéma ABC n’a attiré que 16.000 spectateurs, le Ritz 27.000 et le Colisée 7.000. Avec de tels résultats, la situation est alarmante et tout espoir semble irrémédiablement perdu.

Ainsi, au moment où le cinéma intéresse de plus en plus les amateurs, au moment où le nombre de salles ne cesse d’augmenter dans les autres pays, au Maroc c’est exactement l’inverse qui se produit. Avec les autres moyens audiovisuels (TV, Internet, DVD), la projection des films dans les salles obscures régresse inévitablement et finira probablement par disparaître à moins que d’autres promoteurs ne prennent l’initiative en créant de nouveaux complexes cinématographiques capables de mener, à l’instar du Mégarama, une action dynamique qui drainera un nouveau public attiré par la qualité.

Fatima-Ezzahra Saâdane
LE MATIN

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