La cité des rêves

Roman Polanski, Martin Scorsese, Ridley Scott… autant de monuments du cinéma qui, par leur présence au festival de Marrakech, contribuent à construire l’image de ce pays, le « plus beau du monde ».

Certains projettent d’immortaliser le plaisir à quelques kilomètres de Marrakech, dans la « Cité du film marocain », un mégaprojet articulé autour du septième art avec la promesse de produire du rêve en quantité industrielle. Pourquoi pas. L’idée n’est pas mauvaise.

On n’a pas de pétrole, mais on peut avoir de l’imagination et la revendre. L’avantage comparatif ? Une réalité si pénible pour le commun des mortels que le rêve est devenu une urgence.

La main d’œuvre et les clients ne manquent pas. Nos concitoyens sont à même, sans être conditionnés, de consommer du rêve et d’en produire sans être formés.

En témoigne la quantité ahurissante de programmes télés et de DVD ingurgités ainsi que la remarquable créativité déployée pour décrypter les cartes et fournir le marché en CD piratés.

Le rêve à Marrakech, la réalité à Tamansourt

Derb Ghalef a mis à genou Hollywood par la seule force du rêve. Pourquoi ne pas canaliser, organiser et faire fructifier toute cette énergie pour en faire une ressource nationale.

Mais le libéralisme, en toute logique, y a pensé avant la nation. C’est une grosse société américaine qui est derrière le projet de la Cité des rêves. La nation, elle, s’occupe de fournir la réalité à Tamansourt, la future ville jumelle et prolétaire de Marrakech.

Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Marrakech et sa cité du film produiront du rêve, Tamansourt fournira le capital travail et les touristes garderont leurs sourires polis.

Un problème toutefois s’est posé aux industriels du rêve. Un problème que rencontrent tous ceux qui fabriquent des produits en très grande quantité. Un problème de qualité.

En effet, si le Marrakechi folklorique n’habite plus Marrakech mais Tamansourt, la part de rêve qu’il incarne s’évapore dans son exil. La grande fabrique a néanmoins trouvé la parade dans le petit manuel du bon manager.

L’astuce consiste à produire de l’artificiel. Le Marrakchi fera semblant d’être heureux. Les promoteurs, eux, pourront l’être pour de vrai.

menara.ma

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